L’édito du 14 juillet : boudin et défilé
Une Chanson à Priori Rigolote Accompagne Tous les Ans un Groupe de Militaires sur les Champs Élysées
Il m’arrive parfois de regarder le défilé du 14 juillet, ne serait-ce que pour voir où passent mes impôts. Attention, pas n’importe lequel : celui des Champs Élysées, retransmis en direct à la télé. Pour être totalement honnête, je zappe régulièrement dans l’attente des deux seuls moments qui m’intéressent : le numéro final, depuis qu’une fanfare y a repris Daft Punk, et surtout le passage de la Légion Étrangère. Pourquoi ? Parce que ces militaires ont leur propre cadence de marche, rythmée par la chanson “Le boudin”. Chouette ! Un peu de légèreté ! J’ai fait l’erreur d’enquêter.
Une comptine pas si innocente
Entendue dans l’enfance (ah ! la cantine du primaire), cette chanson n’est hélas gastronomique que dans ses premiers mots. Cela m’a pourtant suffi pour la fredonner devant chaque plateau de charcuterie durant des années. D’autant plus que les paroles suivantes (souvent chantées la bouche pleine, donc difficilement intelligibles) parlent d’Alsaciens et Lorrains. Double validation donc, puisque leur patrimoine culinaire n’est plus à démontrer. La chanson dit aussi que “pour les Belges, y en a plus” ! J’imagine qu’à l’époque leur identité alimentaire n’était pas aussi reconnue que la nôtre…
🍽️ L’histoire du boudin charcutier
Mais quand même, un corps d’armée défilant sur une comptine, c’est interpelant, non ? Parce que la cuisine rassemble et que la Légion est composée d’étrangers ? Trop facile. Parce que le rythme convient mieux à leur marche ? D’autres musiques existent. Ils n’ont pas non plus inventé le boudin, puisqu’il vient de l’Antiquité. Parce qu’ils sont trop sérieux et semblent faire la tête (du boudin) ? Je n’y crois pas. Pas d’explication non plus chez les commentateurs télévisuels. J’ai donc fait des recherches.
Je n’aurais pas dû ! Adieu la légèreté de l’enfance, les chewing-gums collés sous la table et les batailles d’eau : le chant n’a rien de rigolo.
La vérité du boudin au défilé
J’avoue, je savais que j’allais me ramasser et perdre les jolies paillettes de bonheurs simples (que je cultive) devant les yeux. Dans une tentative d’explication gore et réaliste, j’ai pensé à la chair à canon, au sang et au boudin (beurk). Mais non, ce n’est toujours pas la bonne explication.
La vérité ? Une déception ! Le boudin fait référence à la toile de tente roulée et fixée au sac à dos des légionnaires : forme et couleur font penser à la charcuterie. Si les Alsaciens et les Lorrains sont mentionnés comme ayant droit au boudin, c’est qu’au moment de la création de la chanson, ces régions étaient allemandes. Ils avaient donc le droit de s’engager.
Dès la 3e phrase, les Belges y sont traités de tireurs au cul ! Si l’histoire l’explique (en 1870, le roi des Belges rappela tous ses ressortissants engagés dans la Légion Étrangère), l’insulte annuelle demeure. Dommage, c’est l’une des nations les plus sympas d’Europe.
Bref, il suffit de lire le reste des paroles pour comprendre que ça n’a rien d’une comptine amusante : c’est un chant racontant les exploits d’un groupe de militaires, avec des accents belliqueux et un langage loin d’être enfantin. J’ai stoppé mes recherches à ce moment-là.
J’ai repensé aux bêtises d’écoliers et aux fous rires étouffés devant des tranches de boudin. Je suis partie acheter des bonbons que j’ai mangés, assise et nu-pieds dans l’herbe, devant le feu d’artifice. Finalement, je préférais ma version. Je ne regarderai peut-être plus jamais le défilé. La plongée inattendue de cette histoire m’a fait revoir mes classiques. Qu’en pensez-vous ? Laissez votre avis en commentaire, joyeuse fête nationale à tous et bon anniversaire Denis !